Vous trouverez ci-dessous des informations complémentaires sur Bellieni qui ne sont pas parues dans
le livre. Elles ont été publiées dans le bulletin du club depuis la parution du livre.
Informations complémentaires
A propos de Schiavetti-Bellieni! (bulletin N° 164)
Compléments sur la Maison Bellieni (bulletin N° 165)
De vieux papiers intéressants (bulletin N° 166)
Le Trésor de la Maison Bellieni (bulletin N° 167)
Dernières précisions sur Bellieni (bulletin N° 168)
A propos de Schiavetti-Bellieni! |
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En répondant à une annonce pour une paire de Jumelles de Marine Bellieni, je ne pensais pas
tomber sur une pièce pouvant lever un nouveau voile sur les turpitudes de l'entreprise Bellieni.
En effet à réception de celle-ci, à mon grand étonnement, cette dernière mentionnait dans les
oeilletons "Schiavetti-Bellieni à Brest".
Pour ceux qui ont acquis et lu mon ouvrage sur le constructeur Bellieni, le nom de
Schiavetti ne leur est pas tout à fait inconnu. En revanche la ville de Brest est une énigme.
Après recherche et enquête, je vous propose de suivre une chronologie pleine de rebondissement
qui démontre que les histoires de familles recomposées ne date pas de ce début de XXI° siècle.
Lorsque André-François Bellieni au début du XIX° siècle se marie en Italie avec Jeanne Taechi,
la soeur de cette dernière Lucrèce, se marie avec Jacques Schiavetti.
Les deux couples ont des enfants Légitimes. La branche Bellieni donne naissance à
Marie Catherine Bellieni (21 Octobre 1814) et en parallèle la branche Schiavetti voie
naître Bernard Schiavetti (21 août 1813).
A la mort de sa première femme en 1820, André-François Bellieni, fait venir sa fille
Marie Catherine à Metz. Elle est élevée avec Charles Gimel son demi frère par Marguerite
Joséphine Gimel qui épouse André François en 1821.
Ce second mariage très mal vue par la famille italienne aboutira sur l'interdiction
à la branche Gimel de porter le nom Bellieni. Seul Henri Bellieni, fils de Charles Gimel,
retrouvera ce droit dans la première décennie du XX° siècle.
Le 13 Janvier 1836, Bernard Schiavetti épouse en première noce à Metz sa cousine germaine
Marie Catherine Bellieni. Le nouveau couple porte le nom de famille composé Schiavetti-Bellieni.
A la mort d'André François en 1843, l'entreprise Bellieni à Metz est sous la
coupe de deux héritiers et lorsque Charles Gimel développe en 1849 le télégraphe
électrique (père du fax moderne) avec Bernard Schiavetti, ce dernier est son associé
propriétaire à 50% par sa femme de l'entreprise messine.
On peut supposer que les tensions familiales ont amené les deux familles à se séparer à
l'amiable en créant dans un premier temps une succursale Bellieni dans le Port de Brest.
Dans un second temps est compte tenu des distances, cette succursale est devenue l'entreprise
d'optique "Schiavetti-Bellieni à Brest".
La première trace retrouvée par votre serviteur sur l'entreprise de Brest est la mention,
dans la revue du génie militaire 1909, d'un courrier du Colonel Goulier daté du 3 janvier 1859
à M. Schiavetti opticien dans le port de Brest.
La seconde, plus récente, date de 1872, il s'agit de sa nécrologie. Cette dernière le décrit
comme un inventeur ingénieur de génie à qui il a manqué la chance et le don du commerce.
On lui doit la création de nombreux prototypes de matériel pour la marine développés avec les
savants militaires de Brest.
A sa mort en 1872, il est décrit comme un homme usé par ses revers et ses difficultés familiales
dont la principale serait la folie de sa femme Marie-Catherine Bellieni.
Par cet article, j'apporte un premier complément d'information et une première correction
sur l'ouvrage H. Bellieni Histoire d'un industriel Lorrain.
Celle-ci n'est pas stratégique pour les iconomécanophile que nous sommes mais
elle permet de mieux appréhender l'histoire de l'entreprise.
Compléments sur la Maison Bellieni |
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La présence du Club en avril dernier à la manifestation photographique du CRI à Nancy
a été l'occasion de rencontrer des collectionneurs, proches ou descendant de la famille
Ritter, tous intéressés par Henri Bellieni.
Deux nouveaux ouvrages de photos réalisées avec la jumelle Bellieni ont pu être identifiés.
Le premier qu'il nous a été proposé de voir et photographier est une réédition des
100 vues de Nancy paru en 1896. Cette nouvelle édition offerte par la Compagnie du
Gaz de Nancy a été imprimée pour le 34ème Congrès de l'industrie du Gaz en France
organisé à Nancy (1917 ?)
Le second est une nouveauté en édition originale de 1898.Il est dans un format
identique à la série présentée dans l'ouvrage sur Bellieni et a pour titre "Les Villes d'eaux de l'est".
Il y est décrit en photo et en textes l'intérêt des 9 villes thermales de l'Est en vogue à
la fin du 19ème siècle. On y retrouve ainsi Bains les Bains, Bourbonne, Bussang, Contrexéville,
Luxeuil, Martigny, Plombière, Sermaize et Vittel.
Une boîte de plaque de la société Lumière commercialisé par la Maison Bellieni et une
pochette Bellieni Ritter ont été également acquise. La boîte de plaque démontre encore
une fois l'effort de communication fait par Henri Bellieni et l'utilisation de tout
support pour faire de la publicité.
De vieux papiers intéressants |
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Lors du passage du Club à la manifestation
du Conservatoire Régionale
de L'Image à Nancy, j'avais eu la
chance de rencontrer Jacqueline Ritter
veuve de Robert Ritter petit fils de
Paul Ritter successeur de Henri Bellieni.
Elle a accepté de me rencontrer et
nous avons pu échanger entre collectionneurs.
Sa collection, centrée sur l'optique et
la géodésie, provient principalement
des greniers de la maison Bellieni Ritter
basée au 1 place Carnot à Nancy.
Elle a ainsi pu sauver de vieux goniomètres,
boussoles nivelantes, alidades,
etc... et surtout quelques rares manuscrits
qui nous permettent à ce jour
de mieux appréhender le fonctionnement
et la dimension de la Maison
Bellieni.
Le premier manuscrit date de 1855. Il
a été rédigé par Monsieur Goulier,
alors capitaine du génie et professeur
à l'Ecole impériale d'application de
l'artillerie et du génie à Metz. Il fait
l'éloge du savoir faire de Charles Gimel
dit Bellieni à l'occasion de l'exposition
universelle de 1855 où Charles Gimel
reçut une médaille de deuxième classe
pour la qualité de ses fabrications. Il
insiste sur le fait qu'aucune des pièces
exposées n'a été réalisée spécifiquement
pour l'exposition. On y apprend
que la Maison Bellieni à
Metz dispose déjà d'un
magasin de revente de
qualité et que Charles
Gimel en tant que fabriquant
réalise lui-même :
1° Toutes sortes d'instruments
en verre, baromètres,
thermomètres,
manomètres, aéromètres,
etc.,
2° Exceptionnellement
des instruments de physique
et de mécanique
de tous genres,
3° Les instruments de
topographie qui exigent
du soin et de la précision
comme les boussoles
nivelantes, les alidades, les boussoles,
les niveaux à lunette, les niveaux
à eau, etc.
Deux manuscrits de textes identiques
et non datés décrivent l'historique de
la maison Bellieni et ses fabrications.
Une allusion à l'exposition de l'administration
forestière en 1878 permet
de situer le document entre 1878 et
1889.
A cette époque, la Maison Bellieni est
à Nancy et fabrique des niveaux à collimateur,
des niveaux à lunette, des boussoles, des théodolites, des
cercles répétiteurs, des déclinatoires,
des alidades et des mires.
Le dernier manuscrit, le plus
intéressant, est rédigé par Henri
Bellieni pour présenter son entreprise
aux membres du jury
de l'exposition de 1889 où il
obtint une médaille d'or. Il est
installé alors au 17 place de l'académie
qui deviendra la place
Carnot.
Dans cette présentation, Henri
Bellieni insiste sur l'importance
du négoce dans l'équilibre financier
de son entreprise.
Pour la fabrication, il occupe
régulièrement dix ouvriers dirigés
par Jules Crépin, contremaître
et ancien élève de son père.
Il dispose d'un atelier de traitement
thermique, de nickelage et
d'argenture, d'un atelier de mécanique
équipé de neuf tours
dont cinq parallèles, une machine
à diviser les cercles, deux
machines à diviser les lignes et
une machine à tracer les traits
parallèles et d'un atelier de menuiserie
ébénisterie pour la réalisations
des boîtes de rangement,
des mires et des pieds
supports.
En 1889, la Maison Bellieni est fournisseur
du Génie, de l'administration
Forestière, de la Cie
des Chemins de Fer
de L'Est et de la
faculté de Nancy.
Les derniers documents
sont l'acte de
vente établit le 17
décembre 1919 entre
Henri Bellieni et
Monsieur & Madame
Ritter ainsi que l'inscription
au registre
du Commerce de la
maison Ritter datant
du 13 décembre
1920.
On y apprend que le
bâtiment du 1 place
Carnot appartient à
Paul Collenot demeurant
à Paris. Le
premier bail remonte
au 12 octobre
1895. En 1919, il loue, à la Maison
Bellieni, l'ensemble du rez-dechaussée,
une cave, un grenier et une
chambre de bonne en 3ème étage et le
bâtiment de l'écurie dans la cour. Le
reste de l'édifice est loué à Monsieur
Heuriot, rentier qui sous-loue les appartements
en étage. Henri Bellieni
loue deux pièces complémentaires à
l'année à Monsieur Heuriot.
La date du 12 octobre 1895 pour l'arrivée
au 1 place Carnot est une information
nouvelle. En effet, cette adresse
n'est utilisée par la maison Bellieni
qu'à partir de 1904. De là, deux hypothèses
: il utilise le 1 place Carnot
pour rapprocher sa menuiserie mentionnée
dans sa présentation de 1889
ou plus simplement suite à la mise au
point de sa jumelle stéréoscopique, il
aménage des ateliers au 1 place Carnot
en vue de leur fabrication. En
1904, l'évolution industrielle aidant, il
quitte définitivement le 17 place Carnot
et y regroupe l'ensemble de ses
activités.
En 1919, les ateliers Bellieni utilisent
dix moteurs électriques qui font fonctionner
sept tours, dont trois parallèles,
une fraiseuse, une scie circulaire
et différentes machines à diviser les
cercle, les lignes et les échelles. Il
dispose aussi d'une forge.
L'acte de vente du 17 décembre 1919
est un acte qui clos une procédure
débutée le 6 octobre 1919. Henri Bellieni
et Paul Ritter se mettent d'accord
sur la transaction. Ils évaluent alors le
stock à 129 027,55 frs. et se mettent
d'accord sur le prix du fonds et sur le
coût du droit au bail pour 50 000 frs
chacun. Soit une transaction totale de
229 027,55 frs. Il est convenu entre
les deux hommes de régler 80 000 frs
cash, le reste de la somme devant
être payé par annuités de 15 000 frs
et produira des intérêts au taux de
5% par an à compter du 6 octobre
1919. Cette transaction garantit un
revenu annuel de 15 000 frs sur dix
ans à la famille Bellieni.
Après le rachat de la maison Bellieni
par la famille Ritter, Paul Ritter attendra
un an avant de s'enregistrer au
registre du commerce le 13 décembre
1920. Suite au départ en retraite de
Henri Bellieni en 1924, la partie négoce
est conservée, ainsi que les ateliers
de fabrication avec le personnel afin
de développer services, entretien et
dépannage. Paul Ritter décède en
1934 et transmet son entreprise à
deux de ses fils, Louis Ritter
(ingénieur des Arts et Métier) et Henri
Ritter (opticien). Le fils d'Henri, Robert
Ritter rejoint l'entreprise et succédera
à son père et son oncle. A la
fin des années 80, l'utilisation de l'électronique
fait fortement évoluer le
métier d'opticien. En 1989, Robert
Ritter décide de vendre son commerce.
Le nouveau propriétaire restera
sur la place encore une petite année
avant de disparaître définitivement.
Au décès de Robert Ritter, sa veuve
Jacqueline Ritter se sépare d'une partie
de sa collection et, en accord avec
le CRI, met en dépôt dans ses salles
climatisées les boîtes de photos provenant
des greniers du 1 place Carnot.
Aujourd'hui, ce fonds Bellieni est
régulièrement enrichi par des dons
provenant d'anonymes repentis ayant
joué, tout petits, dans les greniers de
la dite maison.
Ainsi se termine le troisième article en
complément de l'ouvrage ''Henri Bellieni
ou l'histoire d'un industriel Lorrain''.
Le Trésor de la Maison Bellieni |
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De 1855 à 1910, la maison Bellieni est présente
dans les expositions
du monde entier.
Les distinctions
obtenues par Henri Bellieni dans les
expositions étrangères vont lui permettre de devenir en 1910 Chevalier de la Légion d'Honneur et en
1923 Officier du même ordre.
Ces médailles dont les droits d'utilisation ont été rachetés en 1919 par
Paul Ritter ont
été conservées pour l'essentiel. Il ne
manque que celle de l'exposition de
Milan en 1906, de Nancy 1909 et les
faces représentant des hommes politiques français.
Ces manques peuvent provenir du
chapardage, de la volonté de Henri
Bellieni d'en conserver à titre personnel ou de leur non existence au profit
d'un diplôme.
Que dire de plus devant un tel trésor…
Je vous laisse parcourir ces 6 pages
d'un témoignage exceptionnel sur une
période révolue. .
Dernières précisions sur Bellieni |
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Bellieni en Russie
M. Younitzky est Garde général
des Forêts Russes. Il a fait ses
études à l'école forestière de Nancy.
Il souhaite répandre l'utilisation de la photographie stéréoscopique
dans le suivi des massifs
forestiers. La comparaison des
clichés pouvant mettre en valeur
les différences apportées par l'é
volution naturelle.
Après quelques essais avec du
matériel courant, il demande à
Henri Bellieni de lui concevoir un
appareil spécial dont une trace est
restée dans les bulletins de la Société
lorraine de photographie.
C'est donc le 20 novembre 1903,
que Henri Bellieni présente cet
appareil stéréoscopique de format
2 x 9 x 12.
Le magasin est du même principe
que les magasins des appareils
stéréoscopiques, ses dimensions
ont été revues afin d'y intégrer dix
huit plaques 9 x 12 en lieu et places
des plaques 8 x 9.
L'obturateur est celui des appareils stéréoscopiques avec mécanisme
de réglage Linhoff.
Les objectifs sont des Zeiss de 95
mm de foyer (soit des grands angles).
Ils sont distants de 72 mm.
Compte tenu des photos à réaliser
et du choix des objectifs, l'appareil
réglé sur l'infini ne dispose
pas de mise au point.
Le décentrement vertical est de
35 mm, il permet de corriger les
aberrations optiques.
Le fait d'utiliser les blocs obturateurs des jumelles stéréoscopiques
permet aux compléments
optiques télé-négative de 27 mm
de s'adapter naturellement pour
les photos au téléobjectif.
Sur son côté gauche, l'appareil est
muni d'un viseur Galilée à décentrement
de l'oeilleton. Sur son
côté droit et sur la partie supérieure,
sont montés deux viseurs
pour le téléobjectif.
Enfin l'appareil est muni d'un niveau à bulle pour le réglage en
station horizontale, de trois
écrous de pied et deux vis permettant le maintien d'un clisimètre
afin de maîtriser l'inclinaison
de l'appareil lorsque cela est nécessaire.
Henri Bellieni dit avoir réalisé trois
accessoires complémentaires, le
premier est un graphomètre, qui
en se fixant sur l'écrou de pied en
partie supérieure, permet de déterminer
avec exactitude les angles
de prises de vues pour le
recouvrement, le deuxième est un
jeu de châssis pour le développement
et le troisième un stéréoscope
en carton dimensionné pour
regarder les clichés 9 x 12.
Jumelle 9 x 12 à double décentrement
Ce modèle de jumelle est le premier fabriqué par Henri
Bellieni. Il dispose de différences extérieures notables
avec les modèles que l'on trouve le plus souvent.
Extérieurement, la poignée du magasin
la masse, sa section est de type rectangulaire. Les poignées à section octogonale arrivent avec le modèle 8.5 x
9 en 1900.
Le viseur ne dispose pas encore des deux pendules intégrés pour faciliter la mise en position de l'appareil.
En séparant le magasin du corps, on peut trouver,
lieu et place du numéro de série, un numéro d'appairage
frappé dans la même police de caractère que celle utilisée sur les modèles de jumelles stéréo à magasin fixe.
(Pour information je dispose d'un modèle plus récent
ayant lui aussi le numéro 11 frappé en petite police de
caractère servant à la frappe des numéros de série).
Dernière différence et non des moindres, la fermeture du
magasin. Sur les modèles généralement retrouvés, une
broche permet de verrouiller le couvercle du magasin
après chargement. Ici, ce verrouillage est plus simple et
se fait à l'aide de deux verrous extérieurs.
Ce modèle ne dispose malheureusement
optique d'origine qui devait être un anastigmat 136 mm
F8 et non le Protar 110 mm F8 présent.
Evolution des jumelles 8.5 x 9 à double décentrement
En 1900, lorsque Henri Bellieni fabrique les premières
jumelles 8.5 x 9 à double décentrement, il utilise des
équipements standards qui évolueront lors des fabrications successives. Ainsi la comparaison entre le modèle
n°17 et le modèle n° 7536 permet de mettre en évidence de petites différences.
La plus évidente est la taille du compteur d'images monté sur le magasin. Avec le progrès, le compteur d'image
est passé de 41 x 41 en 1900 à 33 x 33 en 1905.
La seconde sont les dimensions du viseur plus haut de
5 mm sur le modèle 1900. Cette hauteur de viseur permettait de fixer le petit niveau à bulle
ment directement devant celui-ci (voir les vis de fixation
sur les photos de la page suivante).
Jumelle 9x12 avec objectif Berthiot
Lorsque Henri Bellieni cède son entreprise à Paul Ritter, son stock n'est que de 16 appareils montés et
prêts à la vente. En revanche, le stock comprend des
appareils à terminer comme 28 jumelles stéréoscopiques,
46 jumelles diverses, 16 jumelles spéciales et
universelles et 3 extra-plat (infos acte de vente) ainsi
que 106 objectifs. Dans les deux catalogues édités par
Paul Ritter, il y est mis en avant l'extra-plat. De l'ancienne
gamme, il ne reste que les stéréo-
panoramiques et les jumelles à double décentrement.
Il est probable que ces catalogues soient à l'image du
stock restant à vendre. Paul Ritter avec Henri Bellieni
revoit l'extra-plat dont ils vont faire fabriquer le châssis
par Demaria Lapierre et terminer dans leur atelier. Il
essaie de trouver des solutions pour terminer et ven
dre au cas par cas les jumelles d'ancienne génération
provenant du stock historique. C'est certainement
avec ces hypothèses que la jumelle ci-contre a été
construite. Des éléments de détails laissent à penser
que ce premier n'a pas abouti et que cette jumelle n'a
jamais fait de photo. L'objectif semble coincé par une
erreur de soudure et l'état général correspond à un
modèle dépouillé pour en réparer d'autre.
Dans l'ouvrage « Henri Bellieni histoire d'un industriel
lorrain », le modèle présenté avec un obturateur Compur est plus abouti. Il dispose, lui aussi, d'un objectif
Berthiot et d'une cale permettant de corriger la position
de l'obturateur.
Jumelle stéréo 9x18
L'existence de cette jumelle a été retrouvée
sur un site de vente aux enchères. Sa description
est assez sommaire mais les numéros
64577 et 64578 des objectifs correspondent
à un lot de seulement deux objectifs
Protar 110 mm f8 acheté par la maison
Bellieni à la maison Zeiss.
Cet appareil est équipé de châssis porte
plaque en lieu et place du magasin fixe.
Son système de visée est centré entre les
objectifs alors qu'il est décalé sur les modè
les de série afin de permettre le montage
du viseur pour téléobjectif.
Nous sommes certainement devant une
commande spéciale et un modèle unique
réalisé dans l'urgence en août 1903 par la
maison Bellieni.
Box tropical 9 x 12 (1899 -1901)
Cet appareil a été attribué à la maison Bellieni par une salle des ventes
allemande en 2008.
La photo mise à disposition dans le
catalogue ne fait apparaître aucune
plaque de constructeur mais l'utilisation d'un obturateur Linhof et d'un
objectif 103 mm de chez Zeiss semble en attester la provenance.
En effet, l'objectif grand angle 103
mm f/9 a été développé par Zeiss
pour la maison Bellieni et fabriqué
exclusivement pour elle.
La monture de l'objectif est identique
à la monture utilisée dans l'agrandisseur solaire sur pied 20 x 30 du constructeur (voir ouvrage cité).
A propos des numéros de série
Depuis l'article « Tous à vos Bellieni
», paru dans le numéro 153 de
Res Photographica, j'ai pu référencer
plus de 225 appareils Bellieni avec
leurs principaux numéros de série
que ce soit sur les boîtiers, les obturateurs
ou les objectifs.
Cette base de données permet d'identifier 4 périodes :
- La première avant 1896 est composée
principalement de chambres
en bois et appareils à joues. Seules
les références des objectifs y apparaissent.
- La deuxième de 1896 à 1900
conserve la rigueur de numérotation
des objectifs, et voit apparaître sur
les fabrications des numéros d'appai
rage et de série. Très vite, Henri Bellieni
grave un numéro sur les obturateurs
des jumelles mono et stéréo.
Cette indication nous permet de sa
voir qu'à cette période il fabrique et
commercialise entre 400 et 500 appareils
par an. En 1899 il développe
la gamme des jumelles à double décentrement,
chaque gamme dispose
d'un numéro de série propre et indé
pendant.
- La troisième de 1901 à 1914 va
voir se profiler un numéro de série
unique, toutes gammes confondues.
Le plus petit numéro retrouvé correspond
à une jumelle 9 x 12 à double
décentrement N° 5218, le plus grand
numéro correspond à un extra-plat
modèle 1913 N° 8998.
- La quatrième est la dernière période,
1919 à 1934, correspond à la
succession Ritter. Le plus petit numéro
retrouvé correspond à un extra-plat 9 x 12 1920 N° 9126, le plus
grand numéro correspond à un extra
-plat 9 x 12 1920 N° 10723. Dans
cette période, deux modèles 10 x 15
m'ont été indiqués, ils portent un
numéro supérieur à 17000, 17249 et
17432. Il manque 3000 appareils
!
En s'attardant sur la charnière entre
la deuxième et la troisième période,
on remarque le manque d'environ
3000 numéros.
Sur le site du Conservatoire Régional
de l'Image de Nancy, on apprend
qu'à fin 1905, la maison Bellieni a
fabriqué près 8000 jumelles dont
3000 pour les Etats-Unis.
La prise en compte du travail de référencement
des objectifs Zeiss réalisé
par Hartmut Thiele, nous amène à
la conclusion que l'entreprise Zeiss a
fourni à la maison Bellieni 1420 objectifs sur l'année 1900 et 1016 sur
l'année 1901 soit des quantités cohérentes avec une hypothèse de vente
de 500 à 700 appareils par an.
Goerz, un nouveau fournisseur ?
Ces différentes données permettent
de poser l'hypothèse que, suite à une
commande importante pour les Etats
Unis, certainement passée dans le
cadre de l'Exposition universelle de
1900 à Paris, Henri Bellieni s'est trouvé confronté à un problème d'approvisionnement
en objectifs. Il se tourne alors vers l'entreprise Goerz. Celle
-ci peut fournir. Cette commande
importante (estimée entre 4000 à
5000 pièces) est un point de départ
plausible pour une rencontre avec
l'ingénieur Anschütz. On peut rappeler que le travail entre les deux hommes
a permis la production des jumelles
universelles et des appareils
de poche.
Un problème de cohérence entre
les numéros de série et les numéros d'objectifs !
La comparaison chronologique des
numéros d'objectifs et des numéros
de boîtiers sur la troisième période
met en évidence que l'ordre de fabrication
ne suit pas l'ordre d'attribution
des objectifs fabriqués par Zeiss.
Pour exemple, deux appareils :
la jumelle à double décentrement 10
x 15 N°7332 est équipée d'un objectif N° 123 412 fabriqué en 1909.
La jumelle universelle 9 x 12 N° 7560
est équipée d'un objectif N° 40 467
fabriqué en 1900.
L'analyse croisée des informations
émanant des appareils retrouvés et
du travail de Hartmut Thiele permet
d'évaluer entre 8400 et 8500 le nombre d'objectifs achetés par Henri Bellieni à la maison Zeiss. En retirant les
objectifs spéciaux, grand-angle et
téléobjectifs, cette évaluation est en
cohérence avec une production de
6000 appareils dont un tiers de stéréo, soit l'ensemble de la production
entre 1896 et 1914 (dernier extraplat N° 8998), hors la commande
pour les Etats Unis.
Une fabrication en grande série,
un montage et une mise en vente au détail ?
La réalisation des 3000 appareils en
un temps record pour les Etats-Unis
a certainement obligé Henri Bellieni à
mettre en oeuvre des moyens industriels importants. Il semble qu'il ait
utilisé ces moyens pour réaliser dans
un premier temps 2000 à 3000 boî-
tiers supplémentaires qu'il équipe au
fur et à mesure de leur mise en vente entre 1901 et 1904. Suite à la
création des nouveaux modèles pour
sa collection 1905, il relance une série importante de boîtiers qui vont lui
permette de vendre des appareils
jusqu'en 1912, année où il crée l'extra-plat en vue de redynamiser son
entreprise et la transmettre à son
fils.
L'histoire en décidera autrement. .